• 01/07/2022
  • Par binternet
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« Cette crise des urgences est d’abord une crise de la médecine de ville »<

Mathias Matallah est spécialiste des questions de santé et de l’accès aux soins et président de Medicine4i, une société de conseil et de technologies en santé.

La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a présenté lundi 9 septembre un plan pour les urgences doté de 750 millions d’euros sur trois ans. Un plan inimaginable il y a encore quelques mois…

Le gouvernement traite dans l’urgence quelque chose qu’il n’avait pas vu venir ! La question de l’accès aux soins risque de polluer l’étape deux du quinquennat. Il n’y avait rien sur ce sujet dans le programme d’Emmanuel Macron et il l’a oublié dans le grand débat, alors qu’une enquête IFOP montre que c’est devenu le premier sujet de préoccupation des Français. L’effet boomerang peut être dévastateur.

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Sans créer de nouveaux postes de soignants ni rouvrir largement des lits d’hospitalisation, le plan Buzyn peut-il faire retomber la pression aux urgences ?

On ne peut pas solutionner vingt ans d’errements en deux ou trois ans et quelques mesures. La crise qui secoue les urgences est le prélude à une crise bien plus globale et autrement plus grave du système de santé dans son ensemble, qui aura des répercussions politiques majeures. Elle est la conséquence directe de la désintégration de la médecine de ville. Les délais d’attente pour un rendez-vous chez un spécialiste sont passés en huit ans de quarante-quatre à soixante-sept jours, hors examens complémentaires. Les patients utilisent désormais les urgences comme un substitut, et elles ne sont clairement ni dimensionnées ni organisées pour ça.

Le futur service d’accès aux soins (SAS) devrait théoriquement permettre de prendre rendez-vous avec un médecin généraliste dans les vingt-quatre heures. Cela paraît-il viable ?

« Cette crise des urgences est d’abord une crise de la médecine de ville »

Les médecins généralistes sont déjà saturés, ils ont déjà souvent plus de 900 patients comme médecins traitants… Ce n’est pas d’un coup de baguette magique qu’ils pourront prendre de nouveaux patients et de nouveaux rendez-vous en urgence. Cette crise des urgences est d’abord une crise de la médecine de ville, la pénurie ne peut pas être résorbée par un nouveau niveau de régulation. Il faudra quelque chose de plus profond. Et l’augmentation du numerus clausus ne prendra pas effet avant dix ans.

La médecine libérale n’a donc pas les moyens de reprendre en charge les patients qui ne se tournent plus vers elle ? Les assistants médicaux et les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) mis en place par le gouvernement ne sont pas une solution ?

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