Alors que tous les regards se portaient sur le groupe familial Clarins, L'Oréal a créé la surprise en annonçant hier soir le projet de reprise d'Yves Saint Laurent Beauté (YSL Beauté) et Roger & Gallet, filiales de PPR. Le groupe dirigé par François-Henri Pinault a en effet reçu une offre ferme d'1,15 milliard d'euros de L'Oréal pour reprendre une entreprise multimarques très convoitée sur le marché. Des négociations exclusives sont engagées.
Cet accord prévoit l'exploitation sous licence de très longue durée par L'Oréal des marques Yves Saint Laurent et Boucheron dans le domaine des parfums et cosmétiques. L'Oréal va également récupérer les licences des marques Stella McCartney, Oscar de la Renta et Ermenegildo Zegna pour leur activité parfums et cosmétiques. Mais les marques Yves Saint Laurent, Boucheron et Stella McCartney restent la pleine propriété de PPR. «Par ce projet d'accord stratégique avec le numéro un mondial des cosmétiques, Gucci Group choisit de doter YSL Beauté des moyens pour exploiter pleinement son potentiel de croissance» , a déclaré François-Henri Pinault, PDG de PPR.
Yves Saint Laurent Beauté a dégagé un chiffre d'affaires de 626 millions d'euros en 2006 pour un résultat opérationnel courant de 32 millions d'euros. Cette acquisition permettrait à L'Oréal de conforter sa place de numéro un en part de marché dans la parfumerie. Il compte notamment les marques Lancôme, Diesel, Armani, Cacharel.
Il se renforcerait aussi en cosmétique haut de gamme où le groupe est très installé, avec notamment les marques Biotherm, Vichy, La Roche Posay. L'enjeu pour L'Oréal consistera à faire coexister ces deux «grands concurrents» . «Yves Saint Laurent est une marque mythique du luxe français, elle bénéficie d'un grand rayonnement international et elle est très complémentaire de nos marques» , déclarait dans son communiqué Jean-Paul Agon, directeur général de L'Oréal.
Pour PPR, le choix de la cession d'YSL Beauté met fin à un long suspense. Depuis plusieurs mois, les rumeurs allaient bon train sur l'avenir de cette division cosmétique qui a su améliorer ses performances financières ces dernières années. Le résultat opérationnel courant est passé de 15 millions d'euros en 2005 à 32 millions à la fin de l'année 2006.
Deux hypothèses circulaient depuis l'été dernier. Dans un marché de la cosmétique qui se concentre, YSL Beauté semblait de plus en plus isolé. Un mouvement était attendu.
Le scénario d'un rachat de Clarins a participé à la flambée du titre du groupe de cosmétique contrôlé par la famille Courtin. Mais dans le même temps, Clarins laissait entendre qu'il comptait mener des acquisitions. De quoi alimenter une autre rumeur : le rachat d'YSL par Clarins.
PPR a bel et bien engagé un choix stratégique, mais privilégie une cession au groupe L'Oréal. Un mouvement qui donnera naissance à un très grand de la cosmétique de luxe, mais qui, par ricochet, isolera Clarins.