• 11/09/2022
  • Par binternet
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Haute couture : dans les coulisses des défilés<

L’élégance retrouve tous ses sens. Pour cette première fashion week en réel depuis mars 2020, le vrai luxe c’est d’associer la vue au toucher. Maria Grazia Chiuri célèbre la poésie Dior. Matière et maestria, jeux de textiles et de textures, savoir-faire d’exception et créativité sans fin : à Paris, la haute couture automne-hiver 2021-2022 s’impose comme le miroir vivant d’un monde qui renaît… et ne manque pas d’étoffe.

Les habituées sont revenues. Européennes, Américaines. Les Chinoises et les Russes n’ont pas eu de chance : les vaccins administrés dans leur pays ne les autorisent pas à entrer en France. Avant on demandait aux clientes si elles étaient Chanel ou Dior, aujourd’hui si elles sont Spoutnik ou Pfizer. Quant aux Moyen-Orientales, elles sont restées méfiantes : avec une réglementation, très stricte et encore plus variable, elles ont eu peur de se retrouver confinées à l’étranger.

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Qu’importe ! Ces dames sont virtuellement là, reliées par Zoom et autres applis personnelles à leurs griffes préférées. On parle de 4 000 clientes haute couture à travers la planète, dont 200 à 400 fidèles du triangle d’or parisien, au centre de toutes les attentions : visites de la suite de Coco Chanel au Ritz, et même de l’abbaye d’Aubazine, l’orphelinat qui l’inspira, plongée dans les archives de la maison Dior, 30, avenue Montaigne – leurs vœux sont autant d’exigences. Elles pourront aussi grossir, maigrir, vieillir : les retouches sont offertes à vie quand on s’habille haute couture, où que l’on se trouve. Et si on ne peut pas se déplacer pour renouveler sa garde-robe ? Pas de problème. Les plus prestigieuses marques présentent leur collection à domicile.

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Haute couture : dans les coulisses des défilés

Quelques rares couturiers tiennent à recevoir personnellement leurs clientes, comme Elie Saab, réputé pour ses robes de princesse réclamant des milliers d’heures de broderie. Le créateur libanais ne conçoit pas son métier sans ces liens privilégiés. Mais pas question de révéler les noms des têtes couronnées, célébrités ou femmes d’affaires, pas davantage que le montant de leurs dépenses (certaines robes peuvent atteindre 1 million d’euros, voire plus). Il faut protéger la cliente en or et se protéger de l’espionnite généralisée. Car « l’excellence de nos savoir-faire est source de grandes richesses », explique Xavier Long, de l’Institut national des métiers d’art. Luxury Highlights estime le marché de la haute couture à 500 millions d’euros en 2020. Une poussière des 217 milliards de ventes des produits de luxe, dopées par les « achats revanches » en Asie, la folie qui vient après des mois de frustration.

Certaines robes peuvent atteindre 1 million d’euros, voire plus

Ainsi, par son appétit, la Chine sauvegarde nos métiers d’art mais surtout propulse les groupes de luxe au premier rang des grandes fortunes mondiales. Dans son dernier classement, le magazine « Challenges » place dans son top 4 français les familles détentrices des groupes LVMH (Dior, Givenchy…), Hermès, L’Oréal, Chanel, pour un patrimoine total de plus de 377 milliards d’euros. Du jamais-vu ! En avril dernier, le magazine américain « Forbes » comptabilisait, lui, 2 755 milliardaires dans le monde, dont la fortune cumulée atteint le niveau stratosphérique de près de 13 000 milliards de dollars ! C’est le vivier de la haute couture.

Voilà dix-huit mois que la capitale ne s’était pas enflammée au rythme des défilés et des soirées fastueuses. Un dîner en l’honneur de Frank Gehry à la Fondation Louis Vuitton, un autre pour Chanel au palais Galliera, encore un au musée d’art contemporain de la Bourse de commerce, pour Balenciaga. Et la plus romantique des balades est organisée à Versailles par Dior, au coucher du soleil dans les jardins du Trianon fleuris des sculptures des Lalanne. Stanel, Iman, Issam, Roxanne et Eva, 16, 17 et 18 ans, n’en demandaient pas tant. Ils n’étaient invités nulle part mais avaient fait spécialement le chemin depuis Rouen, Nantes et Créteil pour regarder le show Balenciaga devant le 10 avenue George-V.

François-Henri Pinault, P-DG du groupe Kering, insiste : « La couture, c’est le savoir-faire avec la créativité. L’essence même de l’art. »

Autre adresse branchée : la rue de Moussy, une des plus anciennes de Paris, près de Beaubourg. L’évêque Cauchon y résida mais surtout Azzedine Alaïa jusqu’à sa mort, en 2017. Au plus près de l’atelier où il travailla, ce matin du 4 juillet, jour de la fête nationale américaine, c’était l’effervescence. Devant les voisins aux fenêtres, clientes, journalistes, tout un petit monde, dont une muse, Farida Khelfa, et une papesse, Anna Wintour, on s’embrassait, on s’enlaçait en attendant la première collection du successeur d’Azzedine, le créateur belge Pieter Mulier. De sa plongée dans les archives de quarante années de codes Alaïa, Mulier a tiré une devise : « Luxe, sensualité, héritage ».

Cette connaissance du passé est utile, mais pour se projeter vers demain, François-Henri Pinault, P-DG du groupe Kering, insiste : « La couture, c’est le savoir-faire avec la créativité. L’essence même de l’art. » Pascal Morand, président exécutif de la Fédération de la haute couture et de la mode, vante ce « territoire de liberté, sans contraintes commerciales ». Chez le dernier des plumassiers de haute couture, Lemarié, où on compte encore une centaine d’employés, on n’en revenait pas d’avoir eu besoin du renfort de quarante artisans, explique la directrice artistique Christelle Kocher. Du show Chanel, elle retient un manteau en tissage de tweed entièrement réalisé en plumes : « Deux mille deux cents heures de travail ! J’en aurais pleuré quand je l’ai vu fini. »

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