• 16/08/2022
  • Par binternet
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Pau : comment i-Sleep crée, fabrique et commercialise de la literie « made in Sud-Ouest »<

« J’ai travaillé vingt ans dans la literie, et je connais à peu près tous les industriels de France, de Belgique ou d’Espagne. Je me suis demandé où l’on pouvait aller dans la région pour chercher chaque matériau, et nous sommes parvenus à 70 % de produits locaux. » Jean-François Noyer et sa petite équipe faite de proches, familles et amis, ont lancé cet automne 2021 la marque i-Sleep, qui propose matelas, sommiers, oreillers et autres têtes de lit, uniquement par vente par correspondance via son site.

Tissus Moutet

Côté matières premières, donc, métal et bois proviennent de Haute-Garonne, tandis que les tissus du producteur orthézien Moutet sont découpés à Puyoô. L’assemblage est réalisé à Lons, chez Alefpa Ateliers 64, la plus grande entreprise adaptée du département (lire par ailleurs). « Cela fait un an et demi qu’on travaille ensemble à monter le projet, avec la volonté de créer une entreprise nationale. Dans ce secteur, à part quelques grandes marques, tout est fabriqué très loin, en Asie », explique l’entrepreneur.

« Seules les mousses viennent du Portugal, on n’a pas le choix car il n’y en a pas en France. Mais c’est une matière raisonnée, les fibres sont issues du recyclage, et tout le montage se fait ici. Par rapport à des produits qui arrivent par conteneurs et ont traversé les océans, notre empreinte carbone est assez ridicule. »

Ingénieur salarié, puis développeur produit indépendant pendant une dizaine d’années, le néoentrepreneur a misé sur l’éthique mais aussi sur la technique, puisqu’il a planché sur la composition des matelas jusqu’à déposer un brevet, pour le produit Universens utilisant des « matières intelligentes ». « Ce n’est pas du tout des objets connectés !, alerte-t-il. Non, notre gamme de matelas autonomes va adapter sa dureté de contact à votre morphologie. C’est-à-dire qu’elle va durcir plus ou moins selon la pression que votre corps exercera. »

Matières intelligentes

Pau : comment i-Sleep crée, fabrique et commercialise de la literie « made in Sud-Ouest »

La gamme de quatre matelas et un surmatelas se veut « le moteur de notre marque » tout en restant, assure le dirigeant, dans une gamme de prix « au cœur du marché » (comptez de 600 euros à plus de 1 000 euros en fonction de la taille du couchage). « Si une innovation n’est pas accessible, ce n’est plus une innovation mais un privilège. »

L’esprit social et la vocation locale n’empêchent pas l’ambition : « Le chiffre d’affaires annuel du marché de la literie est estimé à 300 millions d’euros en France. On a lancé la production et la commercialisation uniquement sur internet. Même si on ne prend que 0,5 % du marché, cela permettra de largement faire vivre la petite entreprise », espère-t-il.

Pas de force de vente en direct, et pas de stockage non plus : « On produit à flux tendus, sans surproduction. La commande déclenche la fabrication. On n’aura donc pas de produits qui restent des mois dans des entrepôts. »

Et si la demande venait à s’affoler, les Ateliers 64 seraient en mesure de suivre : « Nous sommes attachés à un consortium, explique sur place le directeur, Jacob Helynck. On pourra délester à des entreprises régionales. On a participé au prototypage, on a estimé les temps de production. Aujourd’hui, on est capables de fabriquer 2 000 oreillers par mois, 500 têtes de lit. On peut être ambitieux, on n’ira pas sous-traiter. Ici les gens s’impliquent, ont envie de participer. C’est très valorisant pour tout le monde. »

L’aventure i-Sleep a été retardée de six mois par le Covid, et n’a bénéficié d’aucune aide des collectivités ou autres organismes. Les 120 000 euros d’investissement de départ proviennent des fondateurs et d’une levée de fonds en crowdfunding ayant atteint 54 000 euros. « Et le Crédit Agricole a cru en nous, avec un prêt de 45 000 euros », souligne encore Jean-François Noyer.

6 emplois adaptés

Alefpa Ateliers 64 est la plus grande entreprise adaptée du département avec une quarantaine de salariés en situation de handicap. L’État compense à hauteur de 30 % leur moindre productivité, réelle ou supposée. Elle est spécialisée en mécanique (Dassault, Turbomeca font partie de ses clients) et en couture (elle a notamment travaillé pour Lacoste). L’entreprise a quitté son hangar à Billère (près du parc du château) pour s’installer sur la zone d’activité de Lons dans des locaux de 2 500 m², quatre travées achetées en 2020. Le projet i-Sleep a déjà permis trois embauches sur des emplois à plein temps en couture, un chiffre qui pourrait doubler à terme.