C'est la nouvelle tendance à adopter, l’objet à posséder, du moins en version numérique: partout, les célébrités se mettent au NFT. Un acronyme aussi mystérieux que le concept qu’il désigne : une œuvre digitale que l'on peut acquérir et posséder, comme un tableau ou sculpture, mais qui ne pourrait s'admirer que par écran interposé.
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NFT signifie «Non Fungible Token», «jeton non fongible», en français. Un objet virtuel, rendu unique grâce à la technologie blockchain, une sorte de signature informatique qui lui confère une identité propre, en certifie l'authenticité, et la rend impossible à copier.
Si les NFT ont commencé à s’échanger dans les milieux du jeu vidéo et du sport (comme, par exemple, des terrains dans un monde virtuel, ou la carte, façon album Panini, d’un footballeur star), c’est dans le monde de l’art qu’ils brassent le plus d’argent. Sculpteurs, photographes ou plasticiens se sont ainsi mis aux NFT. Jeudi 12 mars, une œuvre numérique de l’artiste américain Beeple, Everydays: the First 5000 Days, s'est vendue aux enchères à 69,3 millions de dollars chez Christie’s.
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— Mike Long Thu Mar 04 19:18:46 +0000 2010
Ce sont les géants de la tech qui ont ensuite porté les NFT sur un terrain plus mainstream. Le 6 mars, le fondateur de Twitter, Jack Dorsey, mettait en vente son tout premier tweet (dont le passionnant contenu se résume à «je suis en train créer mon compte»), posté il y a quinze ans.
Le 23 mars, le tweet était acquis pour la modique somme de 2,9 milllions de dollars (environ 2,4 millions d'euros, reversés à une œuvre de charité) par le président d’une compagnie de blockchain qui se réjouissait d’avoir en possession «l’équivalent de la Joconde». Une transaction qui n'empêchera personne de continuer à consulter ce post historique : comme la Joconde, il reste visible par tous. Mais, de la même manière que celle du Louvre ne ressemble en rien à ses innombrables copies, seul le Tweet «certifié» par un NFT sera reconnu comme authentique, et monétisable uniquement par son propriétaire. A condition que ni Dorsey, ni Twitter, ne le suppriment.
Mi-mars, c’était au tour d’Elon Musk de poster sur Twitter un morceau électro de sa composition. Avant de se rétracter : malgré des offres s’élevant à 1,12 million de dollars, le milliardaire a finalement estimé que «ça ne semblait pas très correct de vendre ça». Sa compagne, la musicienne Grimes, s'est posé moins de questions : le 1er mars, dix œuvres numériques signées de sa main (virtuelle), représentant des angelots chauves flottant au dessus d’un globe terrestre ou d'un temple en ruines, s’envolaient en 20 minutes pour une somme totale de 5,8 millions de dollars (plus de 4,8 millions d'euros), levée au profit d'une ONG écologique.
Mystère, fortune et nouvelles technologies : il n’en fallait pas moins pour que d’autres célébrités s'y mettent aussi. Alors qu'il y a un an, Paris Hilton mettait aux enchères - à des fins caritatives - un remarquable dessin de son chat, Munchkin, estimé à 17.000 dollars (environ 14.000 euros) et a, depuis, créé un compte Instagram dédié à ses œuvres digitales, Lindsay Lohan vendait en mars dernier un portrait d’elle pour 50.000 dollars (environ 41.000 euros).
Kate Moss, mi-avril, a de son côté collaboré avec le collectif MITNFT (Moments in Time NFT) pour créer trois vidéos la représentant en train de se balader, de dormir et de conduire, permettant à leurs heureux propriétaires de «posséder» quelques instants de la vie du top, qu'ils pourront ensuite montrer à d'autres s'ils le veulent. Si, là encore, une partie de la somme récoltée ira à un organisme de charité, la Britannique a précisé dans un communiqué de presse que les NFT étaient pour elle «un nouveau medium artistique auquel [elle] pouvait participer directement, en contrôlant [son] image».
Reprendre le contrôle : c’est dans ce but qu’Emily Ratajkowski s’est, elle aussi, emparée des NFT. Cet automne, l’actrice et mannequin expliquait, dans une tribune publiée sur le site The Cut, combien son image était souvent exploitée : l’artiste américain Richard Prince venait par exemple de se servir, sans son autorisation, de l'un de ses posts sur Instagram pour l'agrandir et en faire une oeuvre de sa série New Portraits, en 2014.
Aujourd’hui, c’est une photo d’elle, posant devant le travail de Prince, qu’elle vend sous forme de NFT. Buying myself back : a model for redistribution («Me racheter : un modèle de redistribution», NDLR) sera mis aux enchères le 14 mai chez Christie’s. Une manière de se réapproprier ce qu'elle estime lui appartenir : «En utilisant le tout nouveau media des NFT, j'espère créer un précédent symbolique pour la propriété en ligne et les femmes, qui permettra à ces dernières d'avoir une autorité continue sur leur image, et de recevoir une juste compensation pour leur usage et leur distribution», a-t-elle tweeté.
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Quant à Armie Hammer, il vient d'être lui de faire l'objet d'un NFT. En début d'année, l'acteur était mis au ban d’Hollywood après que des jeunes femmes l'ont accusé d'agression sexuelle, et dévoilé des messages dans lesquels il leur faisait part de ses fantasmes de viol et de cannibalisme. Parmi elles, une artiste américaine du nom de Julia Morrison : le 23 avril, cette dernière a mis en vente certains de ces messages sous forme de NFT. Interrogée par le site américain The Daily Beast, Julia Morrisson entend faire de sa démarche une manière «d’authentifier» les faits et gestes de Armie Hammer, qui les a toujours niés. Et a promis, elle aussi, d’en reverser les profits à une œuvre de charité.