• 09/03/2022
  • Par binternet
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Au lit avec Fidel, Oussama, Saddam et Kim...<

Ava Gardner gifle sa rivale auprès de Castro

Le 27 février 1959, Marita Lorenz a eu l'occasion de connaître bien plus intimement le chef de Cuba que sa mère ne le soupçonne. Alors en goguette sur le pont du MS Berlin, la jeune fille de 19 ans a fait preuve d'une hardiesse qui lui était jusqu'alors inconnue. «Je l'entraînai entre les canots de sauvetage, sous prétexte de contempler le magnifique alignement des bâtiments de La Havane [... ]. Nous nous enlaçâmes, il prit mon visage entre ses mains puis me dit: “Te quiero, mi cielo.”

Avant de desserrer l'étreinte, il a pris soin de consigner le numéro de téléphone de son appartement sur la 87e rue à New York, et lui a fait livrer dix pots de glace à la noix de coco. Il a parachevé le rêve d'une formule aussi suave que ramassée: «Tu seras la reine de Cuba.» C'était plus qu'il n'en fallait. En moins de deux semaines, Fidel envoie son avion à New York. «Je restai perplexe: pourquoi m'avait-il choisie, lui qui pouvait avoir toutes les femmes à ses pieds?»

A l'aéroport de La Havane, 20 hommes en uniforme l'attendent pour l'amener dans la désormais célèbre chambre 2406 du Hilton. Marita Lorenz est accueillie dans la suite présidentielle envahie par un épais brouillard de fumée de cigare. Des lettres, des papiers et des disques gisent au sol. Ce sont surtout de petits blindés pour enfants abandonnés çà et là qui la surprennent. Elle en apprend bientôt la raison: «Fidel est toujours resté un grand gamin, il aime jouer avec des modèles réduits de voitures ou de chars d'assaut.» Electrisée par l'atmosphère, Marita attend plus d'une heure durant que Fidel daigne la rejoindre (...). Arrivant enfin, il tire les rideaux, lui prend la main et met un disque de musique romantique.(...) La mélodie n'est interrompue que cinq heures plus tard, lorsque Raúl vient frapper violemment contre la porte, jugeant que son frère manque gravement aux affaires de l'État. «Ne sors pas de cette chambre, attends-moi ici. Je t'aime», glisse-t-il avant de s'en extirper. La journée se passe pourtant sans qu'il revienne.

Le lendemain, après s'être fait une beauté, la voilà attendant encore indéfiniment. Fidel, mettant toujours à profit l'engouement qu'il provoque sur la gent féminine, lui a confié un rôle de secrétaire particulière. Les longues heures d'attente se transforment en tri sélectif de sa correspondance, non sans irritation à la lecture de missives de femmes trop enthousiastes.(...) Un jour, Marita intercepte la lettre d'une certaine Mlle Gardner, actrice hollywoodienne de son état. La belle Ava avait déménagé à Cuba peu après la révolution, posant ses valises au second étage de l'hôtel Nacional.

En ce printemps 1959, une rencontre a été organisée au Hilton et Fidel s'est montré plus que charmant. Il a fait faire à l'Américaine le tour de son quartier général avant de l'installer sur le balcon pour déguster quelques cocktails en sa compagnie. Ava est séduite: «Elle parlait de lui avec emphase à son retour», confie son amie Betty Sicre. «Elle était très impressionnée par lui et dit qu'il était plein de bonnes idées.» Marita ne supporte pas que cette «femme d'un certain âge» s'entiche de Fidel. Un matin, descendant dans le hall de l'hôtel, elle tombe sur une apparition visiblement ivre qui appuie sur tous les boutons de l'ascenseur. La suite est épique: «Elle tituba jusqu'à moi et me dit: “Alors c'est toi la chienne qui est avec Fidel et qui le garde rien que pour elle?” Pour ensuite me mettre une claque en plein visage!»

Ben Laden à sa femme Najwa: «Arrête de penser!»

Esseulée au milieu de ses quatre garçons, Najwa manque cruellement de divertissements. Remarquant un jour que les cheveux blonds de leur petit dernier poussent, elle voit dans ces crins d'or l'occasion d'assouvir son désir de petite fille. «Sans réfléchir davantage, j'ai commencé à faire des tresses dans ses cheveux et à essayer sur lui différentes coiffures chics, comme les nattes aux queues des chevaux de mon mari.» Le ver est dans le fruit et bientôt les symptômes empirent. «C'est ainsi que je me suis retrouvée à dessiner et coudre des robes de petite fille en utilisant Omar comme mannequin pour les essayages.»

Oussama Ben Laden en 1998. Crédits photo : Sygma/© Mike Stewart/Sygma/Corbis

Bientôt elle n'a plus le coeur de lui faire quitter ces adorables tenues. Najwa a totalement sombré. «Il n'a pas fallu longtemps pour que je lui fabrique toute une garde-robe de fillette.» Elle justifie son addiction en se disant qu'il n'est qu'un bébé et ne se souviendra donc de rien. Tout ira bien tant qu'Oussama n'en aura pas vent. Mais après un nouveau mois au Pakistan, le guerrier de Peshawar regagne son foyer à l'improviste. Omar entre dans la pièce, trottinant vers son père, longue chevelure nattée et robe de fillette. «Mon estomac était noué alors que mes yeux étaient rivés sur mon époux pour voir ce qu'il allait dire ou faire.» Circonspect, Oussama s'accroupit près de son fils et passe ses doigts sur sa robe puis dans ses fantaisies capillaires. Hésitant, il regarde Omar, puis son épouse, à nouveau son fils, puis Najwa. Appréciant les talents de couturière de son épouse, sa réaction est des plus inattendues. «Ses longs doigts ont flatté la jolie robe de notre fils, puis il a annoncé tranquillement: “Omar, tu portes une robe de fille, tu es un garçon.” Il a brossé légèrement de la main les cheveux d'Omar: “Tu as une coiffure de fille, tu es un garçon.”» Les secondes passent comme des heures dans le coeur de celle qui n'avait jusqu'alors jamais mécontenté son mari. «En fait, j'étais la femme la plus soumise qui soit», admet-elle, prête à accepter le châtiment. Mais loin d'élever la voix, Ben Laden comprend la fragilité psychologique dans laquelle ses absences répétées plongent sa femme. D'une voix encore plus douce que d'habitude, il tente de la faire revenir à la réalité: «Najwa, Omar est un garçon. mets-lui des habits de garçon et coupe ses cheveux longs.» La peur lui a servi de leçon, elle tiendra bon désormais.

Du moins, tant qu'il est à la maison. Car aussitôt reparti pour le Pakistan, la désintoxication se révèle plus dure que prévue et Najwa fait une rechute. La rébellion vestimentaire reprend. «Mon époux est rentré à l'improviste et m'a surprise en train d'admirer une petite robe rose sur Omar, dont les cheveux tombaient en boucles.» Oussama se tait, ses yeux se font menaçants. «Cette fois j'aurais intérêt à ne plus tenter le sort», juge-t-elle avec sagacité. Les petites robes sont rangées dans une malle en attendant la naissance d'une fille.(...) L'ennui fait place à l'angoisse. Les inquiétudes de Najwa ne sont pas déraisonnables, car de son voyage suivant en Afghanistan, Oussama rapporte des cicatrices sur tout le corps. Les retrouvailles se font dans une sorte de catatonie dès lors qu'il lui avoue avoir appris à piloter un hélicoptère. Alors qu'elle s'apprête à poser de nouvelles questions, l'ordre tombe: «Najwa, arrête de penser.»

Saddam Hussein auprès de ses blondes

Au lit avec Fidel, Oussama, Saddam et Kim...

Sajida tient à être à la page. Elle passe commande de vêtements aux femmes ayant la liberté de voyager, par exemple la femme du commandant de bord de Saddam, Alia Salbi. Mais certaines de ces acheteuses déléguées se plaignent ; Sajida n'est pas prompte à les rembourser. Un jour enfin, le président donne à son épouse l'autorisation de quitter le pays pour quelques semaines, flanquée de deux tantes. Il confie à chacun des membres de la petite délégation familiale une somme de 10.000 dollars, avec pour instructions de faire les boutiques et de se divertir.

C'est que Sajida, avec «ses sourcils dessinés et foncés, dont le trait tout circonflexe ne trahit aucun mouvement», doit entretenir le culte de la personnalité dont elle est l'objet chez les femmes du palais, à grand renfort d'exhibitions de tenues et de bijoux, et de cadeaux à ses favorites, qui doivent être renouvelés fréquemment. Au début de l'année 1981, la femme du président irakien débarque ainsi à Londres accompagnée d'une vingtaine de proches du palais, et déferle sur les boutiques de luxe de Bond Street, avec Hermès pour principale cible, dépensant des centaines de milliers de livres.

Sa soif de strass et de griffes assouvie, elle s'envole le mois suivant en compagnie de l'ambassadeur d'Irak à l'ONU à bord du Boeing 747 Jumbo Jet flambant neuf acheté aux Etats-Unis par le commandant de bord personnel de Saddam. Le sol est recouvert d'une moquette vert et blanc aux emblèmes présidentiels guidant vers des chambres séparées au mobilier contemporain. La suite du raïs est ornée d'un lit gigantesque, d'une salle de conférences et d'un bureau, ainsi que d'une salle de bains. Voici donc Sajida embarquée en direction de New York, avec cette fois une délégation de trente acheteurs compulsifs menée par son favori du moment, Hussein Kamel al-Tikriti. Sajida se prend de passion pour le magasin Bloomingdale's et y consume des sommes folles.

La distance semble rapprocher le couple présidentiel, et les époux se parlent au téléphone tous les jours. Peut-être Saddam suit-il ainsi habilement les manoeuvres de Hussein Kamel dont la mission à New York est d'acheter en secret des munitions pour la guerre contre l'Iran. Des contrats avec des sociétés-écrans sont signés pour fournir l'Irak en matériel militaire, malgré l'embargo américain. Si Sajida ne dirige pas les opérations, elle fait en tout cas bon usage des généreux pourboires donnés par les firmes américaines en gage de bienvenue. Ce qui semble être une futile addiction aux accessoires de luxe paraît plutôt un dérivatif, une distraction au délaissement de son mari.

A cette époque en effet éclate le premier scandale autour des aventures extraconjugales de Saddam, qui préfère à son épouse celle du ministre de l'Information et de la Communication, une sensuelle joueuse de tennis. De retour en Irak, les tentatives de Sajida pour être une femme au foyer comme les autres ne prospéraient guère plus. Elle avait décidé de mettre en terre devant chez elle quelques plants de tomates. Mais elle n'avait aucunement tenu compte de l'endroit et avait placé les jeunes pousses sous un soleil sans ombre. Les six gardes du corps qu'elle délégua à leur entretien eurent beau les arroser, ils furent bientôt fanés aussitôt. Résultat de l'entreprise, elle envoya ses gardiens horticoles incompétents au frais pour dix jours. (...)

Bagdad, 1969. «A partir de maintenant, elle est à moi, et personne d'autre n'a le droit de la regarder avec intérêt», ordonne Saddam à Barzan, qui l'accompagne. Les deux frères Hussein font une entrée fracassante à la sauterie donnée chez Arut al-Khayat, le couturier arménien de l'élite bagdadi. Saddam a immédiatement repéré une jeune adolescente blonde, la primesautière Parisoula Lampsos, 16 ans (...), qui, elle, a tout de suite remarqué son costume bleu en soie, sa chemise blanche comme neige faisant ressortir ses cheveux très foncés. «Jamais je n'avais vu des yeux aussi incroyables, mordorés. Ils brillaient comme du métal.» Elle ose partager avec lui sa découverte: «Vous avez des yeux sauvages, un regard si froid.» C'est Saddam, mais elle ne le sait pas, et Saddam rit. L'effronterie de la jeune femme aux yeux clairs lui plaît, à lui que tous craignent déjà. Elle n'a peur de rien, sauf que sa mère apprenne qu'elle est là à danser avec des inconnus. (...) Il s'approche d'elle, la serre. Elle crie. «J'étais à la fois effrayée et outrée.» «Tu as de beaux yeux», lui glisse-t-il en la lâchant. Mais la blonde n'est pas Michèle Morgan, et elle répond avec aplomb qu'elle doit partir. La proie n'est pas encore ferrée.(...)

Sadam Hussein en famille. Crédits photo : Getty Images/Getty Images/AFP

On déguste ce soir-là un mets des plus raffinés, une carpe. Dans la tradition arabe, la partie arrière de la tête du poisson est considérée comme la plus fine, littéralement «le cadeau du pêcheur». Offrir ce morceau à quelqu'un signifie l'honorer de son attention. Saddam découpe l'animal et se tourne vers elle: «Ouvre la bouche.» La symbolique du geste plus que les mots surprend toute l'assemblée. L'hôtesse, hors d'elle, congédie la gourgandine. Parisoula se lève, mais il ne l'entend pas ainsi. «Vous n'êtes ni mon mari ni mon fiancé, je n'ai pas à vous écouter», rétorque-t-elle dans un silence glacial. Seul le rire de Saddam permet aux invités de ne pas avaler une arête de travers. L'impétueux dandy suit la jeune femme jusque devant sa porte. «Si ma mère te trouve là, elle te tue, le met-elle en garde. - Laisse-la me tuer, je m'en fiche.» Il rit de son mécontentement: «Ne change pas, reste comme tu es, rentre vite avant que je change d'avis.» Un dernier coup d'oeil à ce frondeur, et elle franchit en vitesse le perron. (Ayant appris sa liaison, le père de Parisoula la renvoie au Liban. Elle revient un an plus tard et s'installe définitivement à Bagdad où elle devient la maîtresse du raïs, ndlr) (...)

Bientôt la guerre avec l'Iran éclate. Les femmes non irakiennes ont le choix entre le divorce et la naturalisation. Cette mesure brutale pousse Parisoula à gagner la Grèce. Ayant laissé plusieurs biens derrière elle, elle entame des démarches auprès de l'ambassade d'Irak à Athènes afin de les récupérer. «Elle fut alors convoquée pour un entretien avec deux officiers du mukhabarat qui lui donnèrent de l'argent et lui apprirent que Saddam les avait chargés d'organiser son voyage à Bagdad», selon le chef du protocole Haitham Rashid Wihaib.

Deux jours plus tard, elle se trouve à nouveau dans le lit de Saddam. «Il y avait des soirées où je ne disais pas un mot, le laissant se reposer. Avec moi, il pouvait être lui-même, laisser claquer les portes de colère, ou poser sa tête sur mes genoux. Je lui demandais juste s'il voulait un verre de whisky.» Il l'installe dans une résidence cossue dans l'enceinte du palais, avec ses deux filles, désormais de ravissantes adolescentes. «Pendant six mois elle mena la vie dorée d'une maîtresse officielle de président. Voitures, bijoux, beaux vêtements, elle ne manquait de rien, juste de liberté», estime Haitham Rashid. Mais par sa relation, Parisoula va se confronter au clan des Tikriti. Rien n'est plus difficile en Irak que d'être la maîtresse de Saddam. (...) Si les femmes du raïs se montrent très discrètes à l'égard de Parisoula, les hommes du clan lui rendent souvent visite, gratification qui n'est pas exempte de risques. (...) Le frêle équilibre avec les turbulents fils de Sajida s'effondre un jour en un aveu de sa fille Elizabeth: Oudaï l'a violée. «Tu veux que je le tue? Tu veux que je le tue?» Parisoula est désemparée. Pendant plusieurs semaines, la jeune fille reste inerte sur une chaise et refuse d'aller à l'école. Il n'y a pas eu de rose rouge ni de draps blancs, elle se serait retrouvée dans une fête sur le bateau d'Oudaï, puis emmenée dans un coin obscur. La nécessité d'assurer la sécurité de ses enfants lie les mains de la mère éplorée, qui n'a d'autre possibilité que d'ignorer Oudaï. mais ce dernier n'est pas homme à se laisser dédaigner. «Dis-moi simplement quelque chose!» lui hurle-t-il un jour au visage. Elle ne voit plus en lui que le bourreau de sa fille: «Tu n'existes plus pour moi. Je ne parle qu'avec des hommes (...) je vais raconter ce qu'il s'est passé à ton père.»

Saddam punit Oudaï une fois de plus de ses débordements, et le fait emprisonner pour l'exemple, suffisamment longtemps pour lui permettre d'ourdir une vengeance. Peu de temps après sa sortie, il entame une mission punitive dans la maison de Parisoula. En rentrant de son travail, elle trouve ses domestiques regroupés dans un coin du salon, Oudaï est de l'autre côté. Il fait battre la délatrice. En ce début d'année 2001, elle comprend qu'il faut partir. (...) Mais elle ne peut quitter le pays sans voir une dernière fois Saddam. «Pari, tu as changé», lui dit-il. «- Mais c'est toi qui as changé, Habibi.» «- Je vois tout, tu n'es plus la Pari que je connaissais avant. Je t'ai dit combien de fois que tu devais rester telle que tu étais?» Elle le regarde. Ils ont tous les deux changé. La situation a changé. Bientôt les Américains bombarderont Bagdad. Oudaï sera tué, Saddam emprisonné. Le clan des Tikriti sera détruit à tout jamais.

Kim Jong-il et les petites femmes de Pyongyang

Les soirées du général Kim commencent toujours ainsi. Ko Young-hee, la première dame, entre avec son époux, et Kim prend soin de la débarrasser lui-même de son manteau, dévoilant son corps désormais épanoui par ses deux grossesses. Elle s'assoit ensuite à ses côtés et fait mine de s'intéresser à la soirée. Le spectacle est parfois des plus affligeants: «Bien ivres, les cadres finissaient par sauter sur une fille. Kim Jong-il pardonnait à peu près tout ce qui se passait dans ses fêtes et ne posait pas de questions», se souvient une des invitées.

Si Jong-il surveille sa conduite lorsque son épouse est avec lui, il ne se prive pas de participer aux réjouissances brutales lorsque celle-ci préfère s'abstenir d'une telle débauche. Ainsi, son séjour en France pour se faire opérer de son cancer du sein lance le départ d'un véritable marathon de luxure au palais de son mari.Dans l'une des résidences, la fête bat son plein. Cinq jeunes filles issues d'un «groupe de plaisir» divertissent les dignitaires rassemblés autour du leader. Soudain, un ordre tombe depuis la place d'honneur: «Déshabillez-vous!» alors que les danseuses s'exécutent timidement, un amendement vient compléter l'oukase: «Même le soutien-gorge et la culotte!» Voilà les sylphides dansant nues bien malgré elles.

Mais l'amusement peut aller encore plus loin. Guilleret, Kim dirige la manoeuvre, indiquant du doigt ses collaborateurs: «Toi, danse avec elle!» Ces règles fantaisistes sont cependant strictes: «Vous pouvez danser avec elles, mais pas les toucher. Toucher, c'est du vol.» La paillardise à la tête du régime est en effet un moyen pour Kim Jong-il de gratifier ses obligés, et de les obliger encore davantage. Une des «institutions» les plus secrètes du régime est celle des groupes de plaisir. 2000 filles sont recrutées à la sortie du lycée, dans toutes les écoles d'art de la capitale, à la condition d'avoir à peine 18 ans, d'être encore vierges et exemptes de toute maladie. Une fois sélectionnées, les sylphides sont réparties en trois groupes, destinés à agrémenter les bacchanales déchaînant les palais de Kim l'équipe de satisfaction, qui délivre des services sexuels, l'équipe du bonheur, chargée de masser et de détendre les fonctionnaires, et l'équipe de chant et de danse.

Kim Jong-il Crédits photo : © KCNA KCNA / Reuters/REUTERS

Jong-il n'a pas de partenaire attitrée. Deux ou trois nymphes sont généralementassises à ses côtés, prêtes à lui fournir une satisfaction bien ordonnée. Vite écoeurée des divertissements de son mari, Ko Young-hee espace ses visites à ces soirées orgiaques, préférant rester dans la résidence du mont Chang Kwang qu'il lui a offerte. Sitôt a-t-elle tourné les talons que les groupes de plaisir font leur apparition. Ils se produisent de préférence les mercredis et samedis à la résidence principale du dirigeant. Les invités sont conviés toujours à la même heure, 19h30. On leur sert à boire en attendant l'arrivée de Kim à 20 heures. Il est de tradition de boire le plus vite possible, et vers 22 heures, tout le monde est généralement totalement ivre.(...)

Jong-il souhaite surtout se montrer dans une forme olympique et goûte pour cela aux mets les plus réputés pour leurs vertus virilisantes. C'est ainsi qu'un jour, ayant reçu un pénis d'otarie, le Cher dirigeant le fait servir en petits morceaux à sa table et pousse ses convives pour qu'ils en fassent festin. Il leur donne ensuite ses instructions pour la soirée: «Mangez le pénis d'otarie, et dites-moi combien de fois vous l'avez fait en rentrant chez vous!» L'une des participantes régulières nous précise que «ce genre de fête pouvait durer une semaine». Le premier jour, les jeunes femmes présentent leurs hommages au dirigeant. Le spectacle inaugural consiste en une danse indienne exécutée en costume traditionnel laissant apparaître le nombril, et en pantalons larges. Aux chevilles, elles portent des bracelets de grelots et s'entourent le corps d'un châle bleu pâle. «Alors que le visage de Kim Jong-il montrait des signes d'ivresse et que l'ambiance dans l'assistance commençait à monter, le groupe d'acrobatie est monté sur scène. Leur poitrine était à peine cachée par leur soutien-gorge, et elles portaient sur le bas une simple étole rouge pas tout à fait opaque. Sans culotte, elles levaient les jambes et répétaient leurs gestes étranges en se tordant la taille.»

Les cadres ivres, n'en pouvant plus, montent alors sur scène pour «soulever le châle et toucher la partie discrète». Totalement échauffé, Jong-il lève alors son verre et demande aux grâces se dandinant devant lui de chanter Je suis moche, une chanson sud-coréenne. Le lendemain, la situation s'aggrave. Le groupe d'acrobatie occupe à nouveau les planches dans un costume encore plus provocant un petit gilet laissant totalement deviner leur fin soutien-gorge, et un simple string pour le bas. «Elles ont dansé comme des débauchées. Kim leur a fait alors des compliments sur leur haute loyauté.»

La soudaine obscénité des costumes et des danses des groupes de plaisir a une explication. Cette troupe revient tout juste d'un mois de voyage en Europe payé par Kim Jong-il. Leur destination: le Lido, à Paris. Mémorisant les chorégraphies et se procurant les mêmes tenues, elles offrent à leur retour un spectacle qui ravit leur mécène, «elles se sont produites en cachant à peine leurs tétons avec un fil brillant, et en couvrant simplement la partie importante pour le bas». Emu d'une telle dévotion envers la patrie, Jong-il fait appeler les danseuses du groupe ainsi que leur chorégraphe et ordonne qu'on les enregistre comme partisans sur-le-champ. Il apprécie tellement cette danse exotique ramenée des faubourgs de Paris qu'il décide de monter lui-même une revue. Il expose fièrement son ambitieux projet à la secrétaire d'Etat américaine Madeleine Albright lors de sa visite en octobre 2000: il a lui-même chorégraphié la grande revue dans le style de Las Vegas qui va se tenir en son honneur le soir même.

Femmes 2 dictateur, de Diane Ducret, Perrin, 383 p., 21 eur.

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