27 octobre : alors que l’on commence tout juste à penser au ski, Vivian revient lui d’une descente en face est du mont Blanc, côté Italien surl’éperon de la Brenva. Un itinéraire classique d’alpinismeskié cet automne en compagnie de Seb Montaz, dans des conditionsparticulièrement sèches malgré un repérage assez optimiste. De passage àGrenoble le soir même, Vivian nous raconte sa deuxième sortie de la saison,avec un regard sur sa pratique du ski en pente raide.
Du ski en conditions moyennes, mais un timing parfait ©IG SebMontaz
« À cette époque l’année dernière, j’avaisdéjà skié comme un dingue autour de Chamonix. Cette année, je n’ai fait que deux sorties, mais deux très belles. » Parti unesemaine plus tôt pour skier l'arêteKufner, autre grand classique d’alpinismedes Alpes, pour la création d’unecapsule vidéo en ski, les yeux de Vivian s’arrêtentsur l’éperon de la Brenva. La ligne a l’airblanche, en bonne neige : Go !
« Les conditions n’étaientfinalement pas si bonnes, mais on a été bons sur l’horaire pour trouver des couleurs magiques.Mission accomplie ! » Départ à 3h30 du refuge pour attaquer la montéeet arriver au sommet de la ligne avec les premiers rayons du soleil.Seulement, arrivés en haut, il faut attendre encore presque une heure « On s’est bien caillés, mais j’étais super bien. J’ai unechance : dès que je rechausse les skis, c’est commesi je ne les avais pas enlevés de l’été. » Si beaucoup de skieurs ont laphobie de ne pas retrouver leurs automatismes en début de saison, Vivian lui s’inquiète plutôt de l’enneigementà son retour sur les lattes. « Cette neige d’automne,elle est très changeante. Il y en a peu ! Ça peut être froid poudreuxcomme croûté, c’est trèsdur de savoir. J’essaye deressentir la neige sous le pied à chaque virage pour ne pas me fairesurprendre. Côté technique, je ne perds pas vraiment messensations. C’est assezagréable d’arriver en confiance avec soncorps »
Une semaine plus tôt, sous l'arête Küfner
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— kay Sun Jun 21 17:18:01 +0000 2020
Skier tôt en automne, c’est aussi accepter l’alpinisme,prendre une part plus importante dans sa pratique. Moins de bon ski, des descentesplus courtes et beaucoup plus de manips. Une autre discipline, tout aussiintéressante pour le skieur « On a pu skier que la partie supérieure, laplus esthétique. Le grand couloir du bas, qui nous paraissait skiable, ne l’étaiten fait pas, on a dû tout désescalader » Des sorties qui se rapprochent plus d’une préparation à l’hiverqu’à du vrai ski. Pourtant, en ce 27 octobre, Vivian glisse là où peu deskieurs auront la chance de poser les lattes.
«J’aitoujours un rituel en haut de mes lignes. Je nettoie ma chaussure, mes fixs, jesuis très méticuleux. C’est unmoment où je focus sur ma descente, quels passages sont dangereux, lesquelssont skiants… C’est unmoment de concentration où j’essaye detout visualiser » Dans ce genre de descentes techniques, le skieurraisonne comme un alpiniste. À l’inverse,mettez Vivian dans du plus skiant, il raisonnera comme un skieur « Si c’est bon, j’ai enviede mettre de la vitesse, des sauts, skier de manière vraiment joueuse. On nepeut pas le faire partout, mais j’adoreça. Le freeride, je trouve, a pas mal bousculé les codes de la penteraide. Ça ouvre la pratique, et c’estbon ! Après, il faut rester humble : même avec un très bon niveautechnique et une très bonne connaissance de la neige, c’est unmilieu extrêmement difficile à dompter » Une notion d’engagementcertaine dans ce genre de lignes, toujours sérieuses, qui ne laissent pas de place à la bêtise. « J’adorefaire des lignes engagées, c’est çaqui me motive. Par contre je prépare tout : la veille d’une descente, je passe la journée à me concentrer sur la descente.Je fais mon sac parfaitement, je fais mon plan A et mes solutions de repli… Jene laisse aucune place au doute. Après, une fois que m’engage,je m’engage ».
Si beaucoup disent que tout a étéfait dans le massif du Mont-Blanc, Vivian n’est pasdu même avis. Le guide compte environ 10 premières à son actif par an, 15 l’année dernière. « Tout n’est pastoujours totalement nouveau, mais on amène notre sauce. On n’est pas là pour dire qu’on estles premiers, on veut apporter un nouveau regard. » L’idée, c’est aussid’inviter d’autresgens à venir skier dans ces nouveaux itinéraires. Ouvrir des lignesintéressantes et assez skiantes pour être répétées : environ 50% desitinéraires ouverts pas Vivian Bruchez ont vu de nouvelles lattes les skier.« Je pense que quand la ligne est belle, elle attire. C’est la plus belle des récompenses. Les gens ont aussi l’envie de s’yfrotter, d’aller voir ce qu’on fait. »
Si ses lignes restent laplupart du temps extrêmement techniques, Vivian n’oubliepas son passé de skieur et ne compte surtout pas s’enfermerdans une pratique. « Si je me limite à de l’ultratechnique, je pense perdre ma vision de la pratique. Déjà, ce serait tropexposé. Mais j’aimeaussi multiplier mes activités. J’ai pleinde bons copains avec qui faire du bon freeride. C’est une richesse qui est pour moitrès importante à conserver. »